Page:Zola - Vérité.djvu/21

Cette page n’a pas encore été corrigée

numéro ? Toutes sortes d’hypothèses étaient permises, et ce serait à la justice d’ouvrir une enquête, afin d’établir la vérité.

Marc sentit passer le vent tragique, dans l’obscurité du drame, comme si une affreuse nuit s’était faite tout d’un coup.

— Ah ! murmura-t-il involontairement, c’est le monstre au fond de son gouffre de ténèbres !

Du monde, pourtant, continuait à s’arrêter devant la fenêtre, et il y avait là les dames Milhomme, les papetières voisines, accourues de leur boutique, en voyant l’attroupement. Mme  Alexandre, grande, blonde, l’air très doux, et Mme  Édouard, aussi grande, mais brune et rude, étaient d’autant plus émues, que Victor, le fils de la seconde, allait chez les frères, tandis que Sébastien, le fils de la première, fréquentait l’école de Simon. Et elles écoutaient Mlle  Rouzaire qui, au milieu du groupe, donnait des détails, en attendant l’arrivée du maire et des gendarmes.

— J’étais, hier soir, à la chapelle des Capucins, pour cette adoration du Saint-Sacrement, qui a été si touchante, et le pauvre Zéphirin se trouvait là, avec les quelques camarades de l’école, les premiers communiants de l’année. Il nous a tous édifiés, il avait l’air d’un petit ange.

— Mon fils Victor n’y est pas allé, il n’a que neuf ans, dit Mme  Édouard. Mais est-ce que Zéphirin s’y était rendu seul ? Personne ne l’a donc ramené ?

— Oh ! expliqua l’institutrice, il n’y a qu’un pas d’ici à la chapelle. Je sais que le frère Gorgias a été chargé de reconduire des enfants dont les parents n’avaient pu venir et qui demeurent assez loin. D’ailleurs, Mme  Simon m’avait priée de veiller sur Zéphirin, et c’est moi qui l’ai ramené. Il était très gai, il a rouvert les volets, qu’il avait poussés simplement, et il est rentré dans cette