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au père, pour qu’il le baisât. Elle avait au cœur un tel amour épure, qu’elle était radieuse elle-même de ces belles couches, de ce gros garçon, goûtant une joie sublime à partager le bonheur de Luc. Et, comme après avoir embrassé le petit, il lui disait tendrement, dans son allégresse  :

«  Sœurette, mon amie, il faut aussi que je vous embrasse, vous l’avez bien mérité, et je suis trop content  !   »

Elle répondit, du même ton tendre et joyeux  :

«  C’est ça, mon bon Luc, embrassez-moi, nous sommes tous si heureux  !   »

Puis, pendant les semaines qui suivirent, il y eut les bonheurs de la double convalescence. Dès que le docteur permit à Luc de se lever, celui-ci voisina, passa une heure dans un fauteuil, près du lit de Josine, couchée encore. Un printemps précoce emplissait la pièce de soleil, il y avait toujours sur la table une gerbe de roses admirables que le docteur apportait chaque jour de son jardin, comme une ordonnance de jeunesse, de santé et de beauté, disait-il. Et, entre eux, se trouvait le berceau du petit Hilaire, qu’elle nourrissait elle-même. C’était surtout l’enfant qui, maintenant, fleurissait leur existence de plus de force et d’espoir. Ainsi que le répétait Luc, dans les continuels projets d’avenir qu’il faisait, en attendant de pouvoir se remettre à l’œuvre, il était désormais bien tranquille, certain de fonder la Cité de justice et de paix, depuis qu’il avait l’amour, l’amour fécond, Josine et le petit Hilaire. On ne fonde rien sans l’enfant, il est l’œuvre vivante, élargissant et propageant la vie, continuant aujourd’hui par demain. C’est le couple qui seul enfante, qui seul sauvera les pauvres hommes de l’iniquité et de la misère.

La première fois que Josine, enfin debout, put commencer sa nouvelle existence, au côté de Luc, celui-ci la serra dans ses bras, en s’écriant  :