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Richard, en mettant des ouvriers en scène, de leur avoir conservé certaines tournures de langage, qui marquent la réalité du milieu. C’était déjà là une audace, et il faut les en remercier. Seulement, j’aurais voulu les voir pousser plus loin l’amour du vrai, s’attaquer aux mœurs elles-mêmes, à la réalité des faits. Leur Gendron, c’est l’éternel bon ouvrier des mélodrames ; leur Louvard, c’est le traître qu’on a vu tant de fois. Les bonshommes n’ont pas changé ; ils restent jusqu’au cou dans la convention. Ils commencent à parler leur vraie langue, voilà tout.

Paris a besoin d’un certain nombre de plaisanteries courantes. Que les chroniqueurs, les échotiers, tout le personnel rieur et turbulent de la petite presse, ait lancé une série de calembredaines sur le mouvement littéraire actuel, rien de plus acceptable ; que l’on fasse par moquerie tenir le naturalisme dans l’argot des barrières, l’ordure du langage et les images risquées, cela s’explique, et nous tous qui défendons la vérité, nous sommes les premiers à sourire de ces plaisanteries, lorsqu’elles sont spirituelles. Mais, en France, on ne saurait croire combien est dangereux ce jeu de la raillerie. Les esprits les plus épais et les plus sérieux finissent par accepter comme des jugements définitifs les aimables bons mots de la presse légère.

Ainsi, on tend à admettre que l’argot entre comme une base fondamentale dans notre jeune littérature. On vous clôt la bouche, en disant : « Ah ! oui, ces messieurs qui remplacent la langue de Racine par celle de Dumollard ! » Et l’on est condamné. Vraiment ! nous nous moquons bien de l’argot ! Quand on fait parler un ouvrier, il est d’une honnêteté stricte,