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qu’on l’attendît. Une voiture le mena jusqu’à Robigneux, où il la laissa sous une grange, car il n’eût pas été prudent de la risquer au milieu des gorges. Et il partit gaillardement, ayant à faire près de sept kilomètres, dans le plus abominable des chemins. La route est d’ailleurs d’une beauté sauvage ; elle descend avec de continuels détours, entre deux rampes énormes de rochers, si étroite par endroits, que trois hommes ne pourraient passer de front. Plus loin, elle longe des précipices ; la gorge s’ouvre brusquement ; et l’on a des échappées sur la mer, d’immenses horizons bleus. Mais M. Mouchel n’était pas dans un état d’esprit à admirer le paysage. Il jurait, lorsque des pierres roulaient sous ses talons. C’était la faute à Coqueville, il se promettait de secouer ces fainéants de la belle manière. Cependant, il approchait. Tout d’un coup, au tournant de la dernière roche, il aperçut les vingt maisons du village pendues au flanc de la falaise.

Neuf heures sonnaient. On se serait cru en juin, tant le ciel était bleu et chaud ; un temps superbe, un air limpide, doré d’une poussière de soleil, rafraîchi d’une bonne odeur marine. M. Mouchel s’engagea dans l’unique rue du village, où il venait bien souvent ; et, comme il passait devant