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LUCIUS.


vieille, et je l’entraîne à ma suite. Elle de crier et d’appeler à toute voix la jeune fille captive dans la maison. Celle-ci arrive, et, voyant la vieille suspendue à un âne comme une queue, elle prend tout aussitôt un généreux parti. Un jeune homme à bout de. moyens n’eût pas mieux fait. Elle me saute sur le dos, et me lance vivement en avant. Eperonné moi-même par l’envie de fuir, pressé par elle, je courais à dépasser un cheval. Quant à la vieille, elle était bien loin derrière nous. La jeune fille priait les Dieux de favoriser sa fuite et de la sauver. » Pour toi, me disait-elle, si tu me ramènes à mon père, gentil animal, je te fais libre de tout travail et te donne chaque jour un médimne 1 [1] d’orge pour ton dîner. La crainte de mes bourreaux, l’espoir d’être bien traité, bien soigné par la jeune pucelle qui me devrait son salut, me donnaient des jambes et me faisaient oublier mon mal.

XXIV. Mais en arrivant à un carrefour où deux roules se croisaient, nous nous heurtons à nos ennemis, juste au moment où ils revenaient de leur expédition. Ils reconnaissent aussitôt dé tout loin, à la clarté delà lune, leurs malheureux prisonniers, accourent à moi et me saisissent en disant : « Holà, charmante jouvencelle, où vas-tu, pauvre petite, à cette heure indue ? ne crains-tu pas les malins esprits ? Allons, reviens à nous ; nous te rendrons à ta famille. » Le tout accompagné de rires sardoniques. Puis ils me tirent et me font rebrousser chemin. Je me souviens alors de mon pied, de ma blessure, et me voilà boitant de plus belle. a Bien, bien, disaient-ils, te voilà boiteux, maintenant qu’on t’a arrêté dans la fuite ; mais quand tu voulais détaler, tu étais bien portant, plus agile qu’un cheval ; tu avais des ailes. » A ces propos succédait le. bâton ; et, grâce à leurs admonestations, j’eus bientôt la cuisse écorchée. En rentrant au logis, nous trou-

  1. 1 Environ un demi-hectolitre.