Page:Zend-Avesta, trad. Anquetil-Duperron, volume 1.djvu/136

Cette page n’a pas encore été corrigée
xc
DISCOURS


jettai ſur un lit. J’y reſtai juſqu’au lendemain, ſix heures après midi, ſans me reveiller, le bras gauche ſur mes yeux, ſelon l’habitude que j’avois contractée dans mes voyages, & la main droite ſur l’endroit où j’avois coutume de mettre mes armes. J’avois le viſage, les mains & les pieds preſque noirs. Ce ſommeil, le premier auquel je me fuſſe livré ſans inquiétude depuis plus de deux mois, remit mes eſprits. M. Aſam m’engagea à paſſer quelques jours avec lui ; & ſes manieres étoient trop polies, pour que je m’y refuſaſſe. Mais je vis que le moyen le plus sûr d’obtenir les ſecours dont j’avois befoin pour la ſuite de mon voyage, etoit de continuer le role d’Envoye de M. Law à M. de Buſſy. Malgré ma répugnance à feindre, je ſoutins ce perſonnage emprunté ; & M. Azam crut, en me rendant ſervice, obliger un homme utile à l’Etat : il le marqua même à M. de Moracin ; & moi, pour ſoulager en quelque ſorte ma conſcience, je lui écrivis le contraire.

La maiſon qu’occupoit M. Afam, avoit autrefois appartenu aux Anglois. Elle etoit au milieu d’un petit Fort, fait de terrefoutenue par des bambous, & qui ne poqvoit gueres la mettre à l’abri que du premier coup de main. Cet Établiſſement me parut alors d’une grande importance. C’eſt à Ganjam que ſe fabriquent les plus belles Betilles (eſpece de Mouſſeline) de la Cote. Les vivres y ſont a grand marché, les grains & le ris en abondance, & cette Contrée pourroit preſque en fournir autant à Pondichery que le Bengale. Il ſeroit très-facile d’y raſſembler des Tiſſerands des Provinces Voiſines. Enfin c’eſt la clé du Dekan du côté du Nord. Auſſi Ganjam a-t-il toujours été frequenté par les Marchands de Bengale, par les Arméniens ; & les Vaiſſeaux d’Europe du port de cinq à ſix cens tonneaux, au lieu d’aller hiverner à la côte de l’Eſt, pourroient ſe retirer dans ſon Port, ſi l’on le nettoyoit, & l’élargiſſoit.

La riviere de Ganjam, formee de trois rivieres qui viennent, l’une du Sud, l’autre du Sud-Eſt, la troifieme du du Nord-Eſt, va du Nord-Oueſt dans l’Eſt ; & après avoir fait un coude, decharge ſes eaux dans la mer. Les lames y ſont terribles. La langue de ſable qui fait le coude, une