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pour recevoir la vérification avant d’admettre personne. Ils lui reprochent, en outre, d’avoir fait tout cela par une excessive et insupportable vanité, qui lui faisait croire que ses connaissances et sa réputation lui laisseraient la direction des états. Le portrait d’un homme tracé par ses ennemis doit nécessairement être chargé ; mais voici de ses traits dont chacun ici reconnaît la vérité, quelque joie maligne qu’il éprouve des erreurs de son caractère. Les amis les plus intimes de M. Necker soutiennent que c’est de bonne foi qu’il a agi et qu’il est en principe partisan du pouvoir royal aussi bien que de l’amélioration du sort du peuple. La pire chose que je connaisse de lui, est son discours pour l’ouverture des états ; c’était une belle occasion qu’il a perdue : aucune vue grandiose ou magistrale., aucune détermination des points sur lesquels devait porter le soulagement du peuple, ni des nouveaux principes de gouvernement qu’il fallait adopter ; c’est le discours que l’on attendrait d’un commis de banque de quelque habileté. À ce propos il y a une anecdote qui vaut qu’on la rapporte ; il savait que son organe ne lui permettrait pas de le lire dans une si grande salle et devant une si nombreuse assemblée ; en conséquence, il avait averti M. de Broussonnet, de l’Académie des sciences et secrétaire de la Société royale d’Agriculture, de se tenir prêt à le remplacer. Il avait assisté à une séance annuelle générale de cette Société, où M. de Broussonnet avait lu un discours d’une voix puissante, entendue distinctement à la plus grande distance. Ce Monsieur le vit plusieurs fois pour prendre ses instructions et s’assurer qu’il entendait bien les changements faits même après que le discours eut été fini. Il se trouvait avec lui la veille de la séance d’ouverture, à neuf heures du soir ; le lendemain, quand il revint, il trouva le manuscrit