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qu’elle l’en eût empêché ! Et la voilà replongée dans son rêve du matin : elle se voyait mariée avec lui, ornant sa petite maison, témoignant mille attentions à la vieille tante, réglant avec la bonne les comptes du ménage.

Puis elle songea que, toutes ces choses, c’était sa sœur Nelly qui les ferait, sa méchante sœur, qui aurait bien dû s’apercevoir de ses angoisses, et s’effacer devant elle. Décidément, Nelly l’avait toujours rendue malheureuse : elle était seule, seule au monde, et tous la haïssaient.


III


Elle pleurait, la tête appuyée sur son lit. Jamais elle n’avait tant souffert. Elle voulut se coucher, dormir jusqu’au lendemain. Mais non, elle irait au bord du lac ; elle marcherait des heures, attendant de cette course et du triste paysage elle ne savait quelle poésie qui exciterait sa douleur.

Elle sortit en courant de sa chambre,