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elle avait été sûre qu’il l’aimait : et sans cesse elle désirait, elle attendait des discours plus tendres, attribuant à tout sorte de scrupules délicats la réserve du jeune médecin. Mais celui-ci, un soir, lui avait dit adieu, dans la cour de l’hôtel, rappelé à Munich par un télégramme.

Il lui avait serré la main cordialement, l’avait remerciée de son obligeance pour lui, puis il était parti : jamais elle n’avait eu de ses nouvelles. Et si parfois elle s’enfiévrait à ce souvenir, certaine d’avoir été aimée, il lui suffisait, pour désespérer, de se rappeler combien il y avait d’indifférence ingénue dans la dernière poignée de main du jeune homme.

L’angoisse, depuis lors, n’avait pas cessé. La pensée fatale s’était répandue dans son âme comme une tache d’huile, s’emparant l’une après l’autre de toutes ses sources de plaisir. Elle ne pouvait plus voir personne ni s’occuper de rien, sans s’apercevoir aussitôt combien tout cela était vain, puisqu’il y avait un bon-