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L’ART WAGNÉRIEN

primitive : c’est ici les cymbales, les grelots, les cliquettes, les carillons. Mais ces chansons exprimaient des émotions réelles, des émotions simples et naïves, plas fines cependant que celles des âges antérieurs. Les mouvements étaient toujours peu variés, d’autant plus expressifs dans le petit nombre des émotions signifiées. Et déjà chaque province avait un langage mélodique spécial.

Ainsi, pendant que les savants compositeurs détruisaient la langue musicale ancienne, une nouvelle langue était fournie à la musique par ces chansons populaires. Parmi elles Luther, avec une merveilleuse intelligence théorique, choisit les premiers chants de son culte. Comme avaient fait les Grecs, il voulut fixer les sons qui convenaient le mieux aux diverses liturgies. Plus tard le vénérable Pierre Louis de Preneste, dit le Palestrina, transmit à la musique scolastique mourante l’élément vivifiant de la mélodie expressive. Une grande partie de son œuvre demeure, pour nous, d’une compréhension malaisée : il emploie un langage encore indécis, intermédiaire entre la langue des vieux savants, pour nous secrète, et la langue nouvelle qui venait du peuple. Mais dans la Messe du Pape Marcel, si différente de ses autres messes, dans les admirables Improperia, il nous montre un étonnant souci de l’expression émotionnelle. Je trouve dans les Improperia un fragment du Popule meus à peine moins sublime que le Popule meus du vieux plain-chant. Ce sont des accords d’une grave dolence, accentuant les angoisses du Christ qu’un peuple a renié : Popule