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L’ART WAGNÉRIEN

cale. Plus tard Sénèque apporta le charme d’une pensée étrangement spirituelle et légère ; et maints auteurs composaient, sous le titre de poèmes, tragédies ou histoires, de médiocres romans dont l’attrait nous demeure perdu.

La légende, le théâtre, le roman, ce furent les trois formes successives de la littérature ancienne. Puis vint le tourbillon où tout s’abîma : et les lettres, qui avaient longtemps survécu à leur utilité, durent s’effacer à leur tour. Un âge nouveau s’ouvrit, ou plutôt de nouvelles âmes arrivèrent au chemin de révolution artistique.


Elles créèrent d’abord des légendes, puis des drames. Le théâtre fut bien la forme littéraire typique, pour les dernières époques du moyen âge : un théâtre non plus de raisonnements ou de discours, mais d’actions, de faits matériels. Dans les drames de Shakespeare cet état de l’âme trouva son expression la plus complète : nulle analyse, nul souci d’une explication psychologique suivie ; jamais on n’a plus négligé l’étude des motifs mentaux. Mais c’est un superbe déploiement de gestes et d’images, un choc de paroles aisément poignantes : la vie colorée, chaude, bruyante, d’une race sanguine.

Corneille créa les drames plus reposés, plus nobles, dune race plus fine. Et déjà l’on sent dans ses tragédies classiques l’impossibilité prochaine de la forme théâtrale. Pareillement les œuvres vivantes et simples de Molière sont plutôt des romans dialogues que de vraies comédies. Et, après