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QUESTIONS D’ESTHÉTIQUE LITTÉRAIRE

les œuvres d’art ne puisse manquer d’être très utile. Le tout est de savoir quelles sont, parmi les circonstances qui entourent l’apparition d’une œuvre, celles que doit retenir et noter un critique historien. Et c’est là-dessus que porte le dissentiment entre les écrivains divers qui, tour à tour, ont essayé d’élargir et d’élever la portée de la critique.

Mais je m’aperçois que tout ce que je pourrais dire à ce sujet a été dit avant moi, et avec infiniment plus de science et d’autorité. Dans le premier volume du grand ouvrage qu’il est en train de publier sur l’Évolution des genres littéraires, M. Brunetière a clairement fait voir la marche de la critique française, depuis La Harpe et Villemain jusqu’à M. Taine. Il nous l’a montrée tendant sans cesse davantage à se constituer une vie propre, à se dégager de ses habitudes anciennes, pour devenir, en quelque sorte, une histoire supérieure des œuvres littéraires. Déjà Sainte-Beuve avait substitué aux jugements sur les œuvres une biographie des auteurs : d’autres, après lui, avaient continué d’agrandir dans la critique le rôle de l’histoire et de la psychologie ; et c’est ce qu’avait fait encore le dernier et le plus grand de tous, M. Taine, enjoignant à l’étude du caractère et de la vie des auteurs, pour mieux éclairer leur œuvre, l’étude du milieu historique et social oii ils avaient vécu.

Mais M. Brunetière ne s’en est pas tenu à nous raconter l’évolution de la critique : il a voulu encore contribuer pour sa part à cette évolution, et c’est ce qui donne un intérêt si particulier à son nouvel ouvrage : La poésie lyrique en France au dix-neu-