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RENAN ET TAINE

Platon, et Fichte l’ont admise. L’esprit, d’après elle, ne sort pas de lui-même, et ce que nous appelons les choses n’est que nos idées. Seul vit le Moi ; les prétendues réalités extérieures sont des rêves de notre âme. Mais une meilleure analyse nous montre que ces rêves sont nos créations volontaires. L’ensemble de nos idées actuelles résulte, constamment et uniquement, de nos idées antérieures. Dès lors, le problème de la substance externe disparaît ; le problème de l’origine chronologique se ramène à la connaissance de l’origine logique, et cette origine est notre activité intellectuelle. Cependant, cette activité n’est point libre : déterminée, au contraire, nécessairement, par nos idées, ou, ce qui revient au même, par nos désirs. Il faut donc admettre que les choses extérieures, le Monde, sont des apparences, mais des apparences aujourd’hui nécessaires. Et, après que nous les avons créées, confuses et désordonnées, dans la Sensation, il faut créer ces apparences à nouveau par la Science, qui leur donne l’Unité et les sacre vivantes. Ainsi Parménide, ayant, dans son poème, exposé la réalité de l’Être immuable, montré que nos visions du monde externe et notre àme individuelle sont des apparences vaines, emploie son Deuxième Chant à bâtir la Science de ces apparences. Et pour les idéalistes modernes, comme déjà pour Parménide et Platon, cette science des apparences est dans l’évolutionnisme. Obligés, par le déterminisme habituel de nos âmes, à vivre en ce monde d’apy>arences, nous sommes forcés encore à concevoir ces apparences comme une