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NOS MAÎTRES

vers nos agitations, un éclat de rire, et une démesurée stupeur de son existence parmi nous.


II

Le comte de Viliiers de l’Isle-Adam fut, dès le début, séduit par les spéculations théoriques. Dans le premier volume, seul publié, de son roman Isis en 1863, il énonçait déjà une conception très originale de la vie moderne. Âgé lui-même à peine de vingt ans, il enseignait aux jeunes hommes le moyen de parvenir : par la dissimulation des sentiments intérieurs, par l’action incessante, par une sérieuse analyse des âmes voisines. Et, sous ces préceptes généraux, des observations d’une extrême finesse, une évidente pénétration instinctive des motifs humains.

Mais les théories générales sur la société ne peuvent satisfaire, par elles seules, une âme noblement créatrice. Elles relèvent trop intimement de la philosophie : elles conduisent trop impérieusement aux derniers problèmes de l’être et de la réalité. Et ainsi M. de Viliiers acquit, dès ces premières années, une curiosité philosophique dont il ne se devait plus séparer.

Au plus profond de la métaphysique il se jeta, avec une indomptable ferveur : il apparut comme un philosophe aux poètes de l’école parnassienne, avec lesquels, d’abord, il fraya. Son humeur impatiente, le continu besoin qu’il ressentait de créer, ne lui permettaient point des lectures bien variées,