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ce « chagrin épineux » qui croît inévitablement, disait Cowper, auprès du bonheur humain ? D’où viendrait la discorde, si elle devait venir ? Le danger dépendait peut-être des deux femmes. Peut-être, un soir, Mary remarquerait-elle qu’Ann portait une boucle des cheveux de William enrichie de diamants. Elle pourrait trouver un poème dédié à Ann et où Cowper exprimait un sentiment plus fort qu’une affection fraternelle. Elle deviendrait jalouse. Car ce n’était pas une campagnarde niaise, c’était une femme cultivée, qui avait les manières d’une duchesse ; elle soignait et consolait Cowper depuis des années, lorsque Ann vint troubler la vie tranquille que tous deux préféraient à tout. Ainsi les deux femmes seraient rivales ; la discorde naîtrait à ce moment. Cowper serait forcé de choisir entre elles.

Mais nous oublions une autre présence dans les divertissements innocents de ces soirées. Ann pouvait chanter ; Mary pouvait jouer ; le