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donné beaucoup de mal pour en guérir les gens. Vous n’avez lu aucun des livres de médecine sur ce sujet ?

— Non, dis-je, car le vieillard s’adressait à moi.

— Eh bien, dit-il, on croyait dans ce temps-là que c’était un reste de la vieille maladie du moyen-âge, la lèpre : il semble que c’était très bien vu, car beaucoup des gens qui en étaient atteints vivaient très retirés et étaient servis par une classe spéciale de personnes malades habillées de façon bizarre, en sorte qu’on pouvait les reconnaître. Elles portaient, entre autres vêtements, des culottes en velours de laine, l’étoffe qu’on appelait peluche il y a quelques années.

Tout cela me paraissait très intéressant, et j’aurais aimé faire parler le vieillard plus longtemps. Mais Dick supportait assez impatiemment tant d’histoire ancienne ; d’ailleurs, je crois qu’il désirait me garder aussi novice que possible pour son arrière-grand-père. Il finit donc par éclater de rire, et dit :

— Pardonnez-moi, voisins, mais je ne peux m’en empêcher. Imaginer des gens qui n’aiment pas travailler ! c’est trop risible. Toi-même, mon vieux, tu aimes travailler… de temps en temps, — dit-il, en tapotant le vieux cheval affectueusement avec son fouet. Quelle étrange maladie ! On peut bien l’appeler les diables bleus.

Et il se remit à rire très bruyamment ; un peu trop, pensai-je, pour ses bonnes manières habi-