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elles me posèrent une foule de questions sur le pays d’où je venais et ses usages, à quoi je fus assez embarrassé pour répondre, et certainement les réponses que je donnai furent assez embarrassantes pour elles. Je remarquai chez ces jolies jeunes filles, aussi bien que chez tous ceux que nous rencontrâmes, — sauf le cas de nouvelles graves, comme celles que nous reçûmes à Maple-Durham, — une vive ardeur à discuter les petits détails de la vie : le temps, les foins, la dernière maison, l’abondance ou le manque de telle ou telle espèce d’oiseaux, etc. ; et ils parlaient de ces choses non d’une manière sotte et conventionnelle, mais comme s’ils y prenaient un intérêt effectif. De plus, je trouvai que les femmes en savaient sur tout cela autant que les hommes, savaient le nom d’une fleur et en connaissaient les propriétés, pouvaient expliquer l’habitat de tel oiseau, de tel poisson, et ainsi de suite.

Il est presque étrange de dire à quel point ce fait modifia mon appréciation de la vie de campagne de cette époque ; car on avait coutume de dire aux temps passés, et c’était vrai en général, qu’en dehors de leur travail journalier, les gens de campagne ne connaissaient rien de la campagne, ou du moins ne savaient rien en dire ; tandis que ces gens-ci étaient aussi curieux de tout ce qui se passe aux champs, dans les bois et sur les coteaux, que s’ils avaient été des bourgeois récemment échappés de la tyrannie des briques et du mortier.