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CHAPITRE XXIII

DE BON MATIN, À RUNNYMEDE


Bien qu’il n’y eût aucun bruit brutal pour me réveiller, je ne pus rester au lit le lendemain matin, alors que le monde semblait si bien éveillé et, malgré le vieux grognon, si heureux ; je me levai donc et vis que déjà, de si bonne heure, quelqu’un s’était dérangé, car tout était propret et à sa place dans le petit salon, et la table mise pour le repas du matin.

Personne, pourtant, n’était sur pied dans la maison ; aussi je sortis, et après avoir fait une ou deux fois le tour du jardin débordant, j’errai à travers la prairie jusqu’au bord du fleuve, où notre bateau m’avait un air familier et amical. Je marchai un peu en remontant le courant et observai le léger brouillard qui ondoyait au-dessus de la rivière, jusqu’au moment où le soleil fut assez fort pour le chasser tout à fait ; je vis l’ablette tacheter l’eau sous les buissons de saule, d’où les petites mouches dont elle se nourrit tombaient par myriades ; j’entendis le grand chabot sauter en éclaboussant l’eau vers quelque phalène attardée, et me sentis presque revenir à mon enfance. Puis je revins vers le bateau, flânai là une minute ou deux ; puis, len-