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des femmes « supérieures » voulaient émanciper la partie la plus intelligente de leur sexe de la charge de faire des enfants ?

Le vieillard redevint tout à fait sérieux. Il dit :

— Je me souviens de cet étrange trait de vaine folie, résultat, comme toutes les autres folies de cette époque, de la hideuse tyrannie de classe qui dominait alors. Qu’en pensons-nous maintenant ? demandez-vous. Mon ami, il est facile de répondre à cette question. Comment serait-il possible que la maternité ne fût pas hautement honorée parmi nous ? Certes il va de soi que les souffrances naturelles et nécessaires que la mère doit subir forment un lien entre l’homme et la femme, un stimulant de plus pour l’amour et l’affection entre eux, et ceci est universellement reconnu. Au surplus, rappelez-vous que toutes les charges artificielles de la maternité sont maintenant supprimées. Une mère n’a plus aucune basse inquiétude pour l’avenir de ses enfants. Il est vrai qu’ils peuvent tourner plus ou moins bien ; ils peuvent décevoir ses plus hautes espérances ; de telles inquiétudes sont une partie du mélange de plaisir et de peine qui constitue la vie de l’humanité. Mais du moins la crainte lui est épargnée (c’était le plus souvent la certitude) que des incapacités artificielles fassent de ces enfants quelque chose de moins que des hommes et des femmes : elle sait qu’ils vivront et agiront selon la mesure de leurs propres facultés. Dans les temps passés, il est évident que la « société » de l’époque venait en aide à son dieu judaïque et a « l’homme de