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e grondeur

 et le bruyant attelage. Et dans les hauteurs,
 décrivant des cercles sans but, les corbeaux croassants
 tournoient autour de la meule blanche de
 givre, ou se tiennent en rang serré sur les rameaux
 ruisselants, et dans le marécage, les plaques de
 glace se fendillent
 sous les pas solennels du héron décharné qui va
 par les roseaux, bat des ailes et ramène son cou en
 arrière, et pousse un cri railleur à la vue de la lune.
 À travers les prairies s'en va d'un pied boiteux le
 pauvre lièvre effaré; qu'on prendrait pour une
 petite tache. Et une mouette égarée, jetant sa clameur
 irritée, voleté comme une soudaine tombée
 de neige sous le ciel d'un gris morne.
 C'est le plein hiver, et le robuste paysan rapporte
 de l'étable glacée sa charge de fagots, frappe du pied
 sur le foyer, jette sur le feu languissant les bûches
 gorgées de sève, et rit de voir le jaillissement brusque
 de la flamme, effrayer ses enfants dans leurs
 jeux. Et pourtant... le printemps est dans l'air.
 Déjà le grêle crocus se fraye passage à travers la
 neige, et bientôt les campagnes blanches vont de
 nouveau se fleurir de primevères que viendra faucher
 quelque jeune gars, car dès les premiers baisers
 d'une chaude pluie, la mélancolie glacée de l'hiver
 se résout en larmes. Les bruns sansonnets s'accouplent,
 et le lapin, les yeux brillants, épie