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Vraiment, il y avait quelque chose de véritablement captivant dans l’idée que le jeune acteur, dont la beauté avait un élément vital dans le réalisme et le romantisme de l’art de Shakespeare, avait été le premier à porter en Allemagne la semence de la nouvelle civilisation et s’était trouvé, dans cette voie, le précurseur de cette aufklärung, ou illumination, du XVIIIe siècle, ce splendide mouvement qui, bien que, initié par Lessing et Herder et porté à son plein et à sa perfection par Gœthe, ne fut pas pour une petite part aidé par un autre acteur, Friedrich Schrœder, qui réveilla la conscience populaire et, au mépris des passions feintes et des méthodes mimiques de la scène, montra le lien intime et vital entre la vie et la littérature.

Si cela était ainsi, — et rien ne prouvait certes qu’il en fût autrement, — il n’était pas improbable que Willie Hughes fût un des comédiens anglais (mimæ quidam ex Britannia, comme les appelle la vieille chronique) qui furent égorgés à Nuremberg dans un soulèvement soudain de la populace et