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VII


Ma maladie elle-même, qui fut grave et très longue, m’a seulement laissé dans la mémoire l’impression d’une chaleur extrême au front et aux paumes des mains, qu’on rafraîchissait continuellement avec des compresses.

Je me rappelle aussi un rêve que je fis au plus fort de ma fièvre, qui revint souvent et qui me montrait toujours un jardin en terrasses, où poussaient, derrière des massifs de roses jaunes, des pruniers tendus en espaliers sur les gradins, portant beaucoup de fruits bleus que je voulais prendre et qui s’évanouissaient dès que j’allais les atteindre : chose bizarre, j’ai revu ce jardin, des années après, à Dinant, dans la propriété d’un ami ; et c’était celui de mon rêve, avec ses mêmes beaux rosiers, ses prunes innombrables sur des arbres très vieux, étendant leurs branches tortueuses au long de la pierre d’une suite de terrasses, prises au flanc des Ardennes. Une sorte de pressentiment de la vision, rendue cent fois plus lucide et plus active par la surexcitation morbide de mon système nerveux, m’évoquait ce site longtemps avant que