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ESCALADES DANS LES ALPES.

(allumés sans difficulté avec une allumette ordinaire), nous constatâmes qu’il était trois heures dix minutes, et par conséquent grand temps de nous remettre en route.

La traversée de la neige exigea vingt-cinq minutes. Elle nous demanda quelques mouvements un peu violents, et nous fit faire d’assez nombreuses glissades, puis, vers quatre heures, nous commençâmes la longue descente des rochers. À huit heures la nuit devait être profonde ; nous n’avions donc pas une minute à perdre, et nous redoublâmes d’efforts. Cette partie de la descente n’offrit rien de remarquable. Nous côtoyâmes de plus près le glacier que nous traversâmes au même endroit que le matin. La sortie en était aussi difficile et aussi dangereuse que l’entrée. Le vieux Sémiond s’en était tiré sans accident, ainsi que Reynaud ; Macdonald qui les suivait glissa en s’efforçant d’escalader un gros bloc de glace, et il eût disparu en un instant dans une profonde crevasse, s’il n’eût été attaché à la corde.

La nuit était presque venue au moment même où nous nous retrouvions tous sur la terre ferme ; mais j’espérais encore que nous pourrions bivouaquer sous notre rocher. Macdonald n’était pas si présomptueux, et il avait raison, car nous finîmes par nous égarer tout à fait, et pendant une heure nous errâmes à l’aventure, tandis que Reynaud et le porteur ne cessaient de se quereller. À notre grand ennui, ne pouvant plus descendre, il nous fallut absolument rester où nous étions.

Nous étions alors à plus de 3200 mètres d’altitude, et, si la neige ou la pluie commençait à tomber comme nous en menaçait les nuages qui se rassemblaient sur le Pelvoux et le vent qui s’élevait, notre situation pouvait devenir assez désagréable. Nous étions affamés, n’ayant presque rien mangé depuis trois heures du matin, et le bruit d’un torrent voisin, que nous ne pouvions apercevoir, augmentait notre soif. Sé-


    côté, c’est-à-dire dans la direction de la Bessée, ou de Vallouise, c’est le Pelvoux qui la cache non moins complétement.

    Ignorant que ce nom allait lui être appliqué, nous donnâmes à notre sommet le nom de Pointe des Arcines ou des Écrins, d’accord sur ce point avec les traditions locales.