Page:Whitman - Feuilles d’herbe, trad. Bazalgette.djvu/656

Cette page n’a pas encore été corrigée

272

FEUILLES D’HERBE


Comme les arbres s’élèvent et se tiennent droits, avec leurs
troncs vigoureux, avec leurs branches et feuilles !
(Il y a sûrement quelque chose de plus en chaque arbre,
quelque âme vivante.)
O émerveillement des choses — jusqu’ à la plus mince par­celle !
O spiritualité des choses !
O accents musicaux qui coulent à travers siècles et conti­nents, nous parviennent aujourd’hui, à moi et 1*Amé­rique !
Je m’empare de vos accords puissants, les diversifie, et
joyeusement les passe en avant.
Moimissi je chante des cantiques au soleil, s’annonçant ou
à midi ou, comme à cette heure, couchant,
Moi aussi je vibre au cerveau et à la beauté de la terre et de
tout ce qui croît sur la terre,
Moi aussi j ’ai senti l’appel irrésistible de moi-même.
J ’ ai descendu le Mississipi sur un vapeur,
J’ai vagué par les prairies,
J’ai vécu, j ’ai regardé par les fenêtres de mes yeux,
Je suis sorti dans le matin, j ’ai^regardé la lumière poindre
à l’ orient,
Je me suis baigné sur la plage de la mer du Levant, puis sur
la plage de la mer du Ponant,
J ’ai roulé dans les rues de Chicago, la cité de l’intérieur, et
en quelque rue que j ’aie roulé,
Villes ou bois silencieux, ou même au milieu des spectacles
de la guerre,
Partout où j ’ai été, je me suis sature de contentement et
triomphe.