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daient leurs limites sous le grand linceul blanc. Plus haut, au milieu de l’immensité monotone du ciel et de la terre, surgissait une de ces fermes mélancoliques de la Nouvelle-Angleterre qui semblent élargir la solitude du paysage…

— Voilà ma maison, me dit Frome, en faisant un mouvement de son coude estropié.

J’étais tellement accablé par la désolation de la scène que je ne sus que lui répondre. Il ne neigeait plus. Sur la pente, au-dessus de nous, se dressait la ferme, qu’un pâle rayon de soleil éclairait dans toute sa pauvreté mesquine. Une vigne vierge desséchée pendait au-dessus de la porte, et, sous leur peinture écaillée, les minces murs de bois semblaient grelotter dans le vent qui s’était élevé après l’orage.

— La maison était plus grande du temps de mon père, continua Frome. J’ai dû abattre l’L, tout récemment. Et, tirant sur la rêne gauche, il ramena sur la route le vieux cheval qui voulait rentrer.

Je découvris alors que l’aspect étriqué et minable de la demeure était dû surtout à l’absence de ce corps de logis que nous nommons, dans la Nouvelle-Angleterre, une L. Cette L est un appentis comprenant le bûcher et l’étable, et qui est généralement relié en équerre au bâtiment principal, avec lequel il communique par la chambre à provisions et la cabane aux outils.