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Il jouissait d’une façon plus désintéressée de la vie d’oisiveté luxueuse à laquelle il se trouvait mêlé. Les compatriotes dont son ami était entouré menaient une existence absolument désœuvrée, sans occupations fixes ni relations suivies, mais avec quel art ils en cachaient le vide profond sous les dehors d’une activité effrénée ! Croisières en yacht, voyages en automobile, dîners luxueux aux restaurants à la mode, après-midi de flânerie élégante à Bagatelle ou à Saint-James, visites aux courses, aux expositions artistiques, soirées aux petits théâtres à l’usage des touristes avertis, toutes ces distractions coûteuses et monotones se suivaient et se renouvelaient sans lasser le besoin d’occupation hérité d’une ascendance énergique et tenace, qui avait mis à amasser l’argent la même rage d’activité qu’ils mettaient, eux, à le dissiper. Certes, Le Fanois s’ennuyait souvent dans ce milieu puéril et flottant. Mais il y trouvait de si douces compensations ! Non seulement ses transactions avec les antiquaires lui donnaient l’occasion d’acquérir à vil prix quelques-uns de ces charmants objets dont il aimait à être entouré, mais à force de vivre aux crochets des autres, il était parvenu à réaliser quelques économies qui lui avaient enfin permis d’organiser une existence à lui.