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sa vision s’éclaircit. Il s’était passé beaucoup de choses dans l’intervalle. Il y avait eu en Julia un vrai conflit d’émotions, d’arguments, d’idées s’entre-choquant, d’impulsions violentes qui s’émoussaient d’elles-mêmes. Elle avait bien essayé de rallier, d’organiser ses forces désordonnées ; — qu’elle pût seulement dompter ses révoltes intérieures et elle entreverrait sans doute la délivrance ! Sa vie ne pouvait être ainsi brisée pour un caprice, une lubie ; la loi elle-même serait pour elle, la défendrait. La loi ? Mais quel droit y avait-elle ? N’était-elle pas fatalement prisonnière d’une loi dont elle avait été le propre auteur ? Ne devenait-elle pas aujourd’hui la victime prédestinée du code qu’elle avait inventé ? Mais non, tout ceci n’était qu’une fantasmagorie grotesque, intolérable, une folle erreur dont elle ne pouvait être rendue responsable ! La loi qu’elle avait méprisée existait toujours et pouvait encore être invoquée… Invoquée ? Dans quel dessein ? Pouvait-elle lui demander d’enchaîner Westall à elle ? N’avait-il pas été permis à Julia de se rendre libre quand elle avait réclamé sa liberté ?… Montrerait-elle moins de magnanimité qu’elle n’en avait exigé ? Ce mot de magnanimité la cingla de son ironie. On ne prend pas une attitude quand on lutte pour la vie… Et Julia prévoyait déjà que pour