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autant que son montagnard d’Aragon. Le roi Carlos est le seul monarchiste solide de la pièce ; et même en don Gomez, sous ses formes de langage respectueuses et dévouées pour le seigneur roi, je flaire un réfractaire de la Chambre introuvable. Le premier acte est intitulé le Roi ; le second, le Bandit ; c’est ex æquo. Est-ce l’enlèvement de Dona Sol ou les journées de Juillet que sonne le cor de Hernani, assaillant avec sa bande le pavé de Saragosse ? Il sonne certainement le régicide. Nous sommes loin des Châtiments, et cependant tout le temps de la pièce Hernani se répète déjà, à lui-même :


Tu peux tuer cet homme avec tranquillité.


L’esprit révolutionnaire de Victor Hugo n’éclate donc pas seulement après les journées de Juillet ou après les torts que le prince Louis Napoléon a pu se donner à son égard. Victor Hugo avait dans les moelles la Révolution française ; il avait dans le sang toutes les aspirations du peuple et de l’homme de la foule qui monte, tous les ressentiments du peuple et de l’homme de la foule qu’écrase le joug d’en haut, toutes les explosions du peuple qui rompt ses freins et de l’homme de la foule qui crève les obstacles pour faire sa trouée. Les héros de ses drames sont des bandits, des capitaines d’aventure, des bâtards,