Page:Weiss - À propos de théâtre, 1893.djvu/299

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

perdre Isabelle et l’héritage. Là est déjà un tout autre sujet que celui de Plaute ; ce rôle respectif du valet et du Ménechme récemment débarqué nous rapproche bien plus de Monsieur de Pourceaugnac que de la comédie latine. Toute la comédie de Plaute, quiproquos à part, roulait autour d’un souper fin qu’un mari infidèle veut se donner chez une courtisane ; toute la comédie de Regnard, quiproquos à part, roule autour des étonnements et des bévues d’un provincial qui vient pour la première fois à Paris. C’est bien le sujet de Monsieur de Pourceaugnac, comme ce sera plus tard celui de la Cagnotte. Regnard, de plus, a eu soin de donner à chacun des deux frères jumeaux un caractère tout à fait opposé ; ce à quoi Plaute n’a point pensé. Enfin Regnard, Français et Parisien de l’an 1700, nous a mis sous les yeux des personnages qui vivent en 1700. Il a modernisé Plaute. La modernité, — mot que nous appliquons souvent aujourd’hui à l’esprit de MM. Halévy et Meilhac, — la modernité était l’une des facultés brillantes de Regnard. Nul mieux que lui n’a su tisser la folie la plus folle dans la trame des réalités les plus crues. En cela, MM. Meilhac et Halévy viennent de lui. Et, pour conclure, prenez dans la pièce de Plaute tout ce qui en est le plus saillant et que nous avons signalé plus haut ; vous n’en trouverez pas trace dans Regnard.