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avec leur richesse de quoi se les procurer sans coup férir.

La civilisation moderne n’étant en fait que l’apanage des gens fortunés et y étant devenue un article de luxe qu’on pouvait se procurer commercialement, les Juifs y eurent facilement accès. À dater de cette époque, nous voyons apparaître dans notre société le Juif cultivé que nous sommes obligés de différencier d’avec le Juif commun et manquant de culture. Le Juif cultivé a épuisé tous ses efforts et s’est donné toutes les peines du monde pour se défaire des signes distinctifs de sa race. Il est même allé jusqu’à se faire baptiser, espérant que le baptême le libérerait de la tare originelle.

Il est juste de dire qu’il n’a pas recueilli, pour autant, tout le bénéfice qu’il espérait de son zèle, mais au contraire, cela en a fait l’homme le plus dur, le moins pitoyable qu’on puisse trouver et cela jusqu’au point d’anéantir en nous la sympathie que nous éprouvions pour le destin tragique de sa race.

N’ayant plus de lien avec ses anciens compagnons de douleur puisqu’il l’avait orgueilleusement rejeté loin de lui, il fut impossible au Juif cultivé de s’en créer de nouveaux dans la société où il se hissait. Seuls, ceux qui ont besoin de son argent sont en communion avec lui ; mais jamais l’argent n’a créé de liens durables entre les hommes. Le Juif cultivé se dresse donc isolé et indifférent dans une société qu’il ne comprend pas, de laquelle il ne partage ni les sympathies ni les penchants et dont l’histoire et l’évolution lui sont restées étrangères. Il a surgi néanmoins parmi ces Juifs quelques penseurs ; mais le