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Je m’étais proposé de voyager cet hiver. J’y renonce. Mais à présent je contemple le monde d’un regard de plus en plus clair ; à chaque dévotion, mon esprit acquiert une force miraculeuse. Actuellement, je dois posséder une grande puissance sur les hommes. Je pus constater cet effet sur Karl, quand il me dit adieu pour quelque temps. Je ne me sens pas toujours bien, physiquement parlant. Mais mon âme reste ordinairement sereine. Aussi me faut-il sourire, quand le petit kobold vient hanter la maison : hier, j’ai entendu de nouveau son remue-ménage.

1er Décembre.

Pauvre malheureux, voilà huit jours que je suis cloué à la chambre et, cette fois, même sur mon fauteuil, d’où je ne puis me lever, et d’où l’on me porte dans mon lit le soir. Cependant il ne s’agit que d’une souffrance extérieure, que je crois même des plus décisives pour ma santé générale : donc mon état accroît pour moi l’espoir de pouvoir me vouer dorénavant, corps et âme, à mon travail, tandis que les interruptions de celui-ci, précisément, rendaient mes dernières crises de maladie tout à fait intolérables… Durant ces périodes, mon intellect est toujours très éveillé : des plans et des ébauches occupent vivement mon imagination. Pour le moment, ce sont les problèmes philoso-

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