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le dégagement de ces fluides élastiques ; ce bruit circule par de longs roulemens dans les vastes cavernes du fond de l’Etna, & la croute vitrifiée qui le couvre tremble sous ses pieds. Il compte autour de lui, & voit jusques dans leur fond les nombreux crateres des bouches latérales ou des soupiraux de l’Etna, qui vomirent autrefois des torrens de matieres embrasées ; mais qui refroidis depuis long-temps, sont en partie couverts de prairies, de forêts, & de riches vignobles. Il admire la masse de la grande pyramide que forme l’ensemble de tous ces Volcans ; elle s’éleve de plus de 10 000 pieds au dessus de la Mer qui baigne sa base, & cette base a plus de 60 lieues de circonférence. Cependant toute cette pyramide n’est de fond en comble que le caput mortuum, ou le résidu des matieres que ces bouches ont vomies depuis un nombre de siecles. Et ce qui augmente encore l’étonnement de l’Observateur, c’est que toutes ces explosions n’ont pas suffi pour épuiser dans le voisinage de cette montagne, la matiere des feux souterrains ; car il voit presque sous ses pieds, les Isles Eoliennes, qui furent autrefois produites par ces feux, & qui en vomissent encore. Mais considérant de plus près le corps même de l’Etna, le Naturaliste observe, que tandis qu’il sort des entrailles de la Terre, des torrens de minéraux vitrifiés qui augmentent la masse de la montagne, l’action de l’air & de l’eau ramollit peu-à-peu sa surface extérieure ; les ruisseaux produits par les pluies & par la fonte des neiges, qui entourent même en été sa moyenne région, rongent & minent les