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la moindre distraction lui dérobe & peut-être pour toujours, un objet intéressant. Même sans distraction, les objets de son étude sont si variés & si nombreux, qu’il est facile d’en omettre quelqu’un ; souvent une observation qui paroît importante s’empare de toute l’attention, & fait oublier les autres ; d’autres fois le mauvais tems décourage, la fatigue ôte la présence d’esprit ; & les négligences qui sont les effets de toutes ces causes laissent après elles des regrets très-vifs, & forcent même souvent à retourner en arriere : au lieu que si l’on jette de tems en tems un coup-d’œil sur un agenda, on retrace à son esprit toutes les recherches dont il doit s’occuper. Mon agenda, borné d’abord, s’est étendu & perfectionné dans la proportion des idées que j’ai acquises ; je me propose de le publier dans le troisieme volume ; il pourra servir même à des Voyageurs, qui sans être versés dans l’Histoire Naturelle, voudront rapporter de leurs voyages quelques instructions utiles aux Naturalistes. J’ajouterai à cet agenda, des directions pour ceux qui voudront entreprendre de voyager sur de hautes montagnes, & quelques avis sur les erreurs dans lesquelles des Observateurs peu expérimentés peuvent le plus aisément tomber.

Malgré toutes les précautions que je prends pour ne rien laisser en arriere, lorsque dans le silence du cabinet, je médite de nouveau sur les objets que j’ai observés dans mes voyages, souvent il s’éleve dans mon esprit des doutes, que je crois