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voyait avec plaisir bondir et écumer sur la croupe noire d'une roche voisine. Il est vrai qu'en hiver la verdure et les oiseaux disparaissent. Le vent, la neige, le grésil, les frimas, entourent et secouent la petite maison; mais l'hospitalité est dedans. On se visite de quinze lieues, et l'arrivée d'un ami est une fête de huit jours: on boit au bruit des cors et des timbales à la santé du convive, des princes et des dames[1]. Les vieillards, auprès du poêle, fument et parlent des anciennes guerres; les garçons, en bottes, dansent au son d'un fifre ou d'un tambour, autour de la jeune Finlandaise en pelisse, qui paraît comme Pallas au milieu de la jeunesse de de Sparte.

Si les organes y semblent rudes, les cœurs y sont sensibles. On parle d'aimer, de plaire, de la France, et de Paris surtout; car Paris est la capitale de toutes les femmes. C'est là que la Russe, la Polonaise et l'Italienne viennent apprendre l'art de gouverner les hommes avec des rubans et des blondes; c'est là que règne la Parisienne à l'humeur folle, aux grâces toujours nouvelles. Elle voit l'Anglais mettre à ses genoux son or et sa mélancolie, tandis que, du sein des arts, elle prépare en riant la guirlande qui enchaîne par les plaisirs tous les peuples de l'Europe.

[Footnote 1: Les femmes sont de ces parties, et il est juste qu'accompagnant les hommes à la guerre, elles président à leurs plaisirs. On ne trouve point ailleurs de plus grands exemples de l'amitié conjugale. J'y ai vu des femmes de généraux qui avaient suivi leurs maris à l'armée depuis le premier grade militaire.]