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sans laquelle il ne pourrait vivre; 3^o que la société doit à son tour à tous ses membres une subsistance qu'ils ne peuvent attendre que d'elle.

Les voyageurs pèchent encore par un autre excès. Ils mettent presque toujours le bonheur hors de leur patrie. Ils font des descriptions si agréables des pays étrangers, qu'on en est toute la vie de mauvaise humeur contre le sien.

Si je l'ose dire, la nature paraît avoir tout compensé; et je ne sais lequel est préférable d'un climat très-chaud ou d'un climat très-froid. Celui-ci est plus sain; d'ailleurs, le froid est une douleur dont on peut se garantir, et la chaleur une incommodité qu'on ne saurait éviter. Pendant six mois, j'ai vu le paysage blanc à Pétersbourg; pendant six mois, je l'ai vu noir à l'Ile-de-France; joignez-y les insectes si dévorans, les ouragans qui renversent tout, et choisissez. Il est vrai qu'aux Indes les arbres ont toujours des feuilles, que les vergers rapportent sans être greffés, et que les oiseaux ont de belles couleurs.

Mais j'aime mieux notre nature,
Nos fruits, nos fleurs, notre verdure;
Un rossignol qu'un perroquet,
Le sentiment que le caquet;
Et même je préfère encore
L'odeur de la rose et du thym
A l'ambre que la main du More
Recueille aux rives du matin.

On doit compter aussi pour un grand inconvénient le spectacle d'une société malheureuse,