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qui souffre qui médite, pour trouver au moins des rapports utiles dans les maux qui l'environnent. Il est si vrai que la nature a fait, du plaisir, le ressort de l'homme, que quand elle n'a pu le placer dans son cœur, elle l'a mis dans sa tête.

Quoique l'Ascension soit sans terre et sans eau, elle ne tient point sur le globe une place inutile. La tortue y trouve, trois mois de l'année, à faire ses pontes loin du bruit. C'est un animal solitaire qui fuit les rivages fréquentés. Un vaisseau qui mouille ici pendant vingt-quatre heures, la chasse de la baie pendant plusieurs jours; et s'il tire du canon, elle ne reparaît pas de plusieurs semaines. Les frégates et les fous ont plus de familiarité, parce qu'ils ont moins d'expérience; mais sur les côtes habitées, ils choisissent les pics les plus inaccessibles, et ne se laissent point approcher. L'Ascension est pour eux une république: les mœurs primitives s'y conservent, et l'espèce s'y multiplie, parce qu'aucun tyran n'y peut vivre. Sans doute la mère commune des êtres a voulu qu'il existât des sables stériles au milieu de la mer, des terres désolées, mais protégées par les élémens, comme des lieux de refuge et des asiles sacrés où les animaux pussent goûter des biens qui ne leur sont pas moins chers qu'aux hommes, le repos et la liberté.

Cette île a encore sa franchise naturelle, que de si belles contrées ont perdue. Quoique située