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Voilà les matériaux dont l'homme, parvenu à la civilisation, fabrique ses titres à l'immortalité. Il en compose ses archives, il y renferme l'histoire des nations, leurs traités, leurs lois, et tout ce qu'il conçoit de plus sacré et de plus digne de foi. Mais qu'arrive-t-il? A peine l'ouvrage paraît au jour, que les journalistes se hâtent d'en rendre compte. S'ils en disent du mal, le public le tourne en ridicule; s'ils le louent, des contrefacteurs s'en emparent. Il ne reste bientôt plus à l'auteur que le droit frivole de propriété, que les lois ne lui peuvent assurer pendant sa vie, et dont elles dépouillent ses enfans peu d'années après sa mort. Que se proposait-il donc dans sa pénible carrière? de plaire aux hommes, à des êtres qui, comme le dit Marc-Aurèle, se déplaisent à eux-mêmes dix fois le jour. Oh! mon ami, un homme de lettres doit se proposer un but plus sublime dans le cours de sa vie: c'est d'y chercher la vérité. Comme la lumière est la vie des corps, dont elle développe avec le temps toutes les facultés, la vérité est la vie de l'âme, qui lui doit pareillement les siennes. Quel plus noble emploi que de la répandre dans un monde encore plus rempli d'erreurs et de préjugés, que la terre n'est couverte des ombres de la nuit et de celles même du jour?

Le philosophe doit extirper les erreurs du sein des esprits pour y faire germer la vérité,