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les terres duquel nous avons passé, a fort bien fait de quitter le service. Après tout, notre grand Frédéric, après avoir fait glorieusement la guerre, passe une partie de son temps à jardiner et à cultiver lui-même des melons à Sans-Souci.» Tout le monde fut de l'avis du hussard. Le ministre saxon même se mit à dire que la Silésie était une belle et bonne province, que c'était dommage qu'elle fût dans l'erreur; mais qu'il ne doutait pas que la liberté de conscience étant établie dans les états du roi de Prusse, tous les habitans, et surtout le maître du château, ne se rendissent à la vérité, et n'embrassassent la confession d'Ausbourg: «car, ajouta-t-il, Dieu ne laisse point une bonne action sans récompense, et c'en est une qu'on ne peut trop louer dans un militaire qui a fait du mal aux gens de mon pays pendant la guerre, de leur faire du bien pendant la paix. L'hôte alors proposa de boire à la santé de ce brave seigneur, ce qui fut exécuté aux applaudissemens de toute la compagnie.

Il n'y eut pas jusqu'au jeune rabbin qui ne voulût aussi trinquer avec elle. Il dînait seul et tristement, de ses provisions, dans un coin de la salle, suivant la coutume des juifs en voyage; il se leva, et vint présenter sa grande tasse de cuir à la dame, qui la lui remplit jusqu'au bord. Il la vida d'un seul trait: alors elle lui dit: «Que vous en semble, docteur? La terre qui