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cria à son tour: «Oh le délicieux pays! il n'y manque que des Français. Qu'avez-vous à soupirer, dit-elle à un jeune rabbin qui était à ses côtés?—Voyez, dit le docteur juif, cette montagne là-bas avec sa pointe, elle ressemble au mont Sinaï.» Tout le monde se mit à rire. Mais un vieux ministre luthérien d'Erfurt, en Saxe, fronça le sourcil, et dit en colère: «La Silésie est une terre maudite, puisque la vérité en est bannie. Elle est sous le joug du papisme. Vous verrez, à l'entrée de Breslau, le palais des anciens ducs de Silésie, qui sert aujourd'hui de collége aux jésuites, quoique chassés de toute l'Europe.» Un gros marchand hollandais, pourvoyeur de l'armée prussienne dans la dernière guerre, lui repartit: «Comment pouvez-vous appeler maudite une terre couverte de tant de biens? Le roi de Prusse a fort bien fait de conquérir la Silésie; c'est le plus beau fleuron de sa couronne. J'y aimerais mieux un arpent de jardin, qu'un mille carré dans la Marche sablonneuse de Brandebourg.» Nous arrivâmes, ainsi disputant, à Breslau, où nous mîmes pied à terre dans une fort belle auberge. En attendant le dîner, on parla du maître du château. Le ministre saxon assura que c'était un scélérat, qui commandait l'artillerie prussienne au siége de Dresde; qu'il avait écrasé, avec des bombes empoisonnées, cette malheureuse ville, dont la moitié des mai-