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Je ne saurais vous dépeindre le triste état dans lequel nous sommes arrivés. Figurez-vous ce grand mât foudroyé, ce vaisseau avec son pavillon en berne, tirant du canon toutes les minutes, quelques matelots semblables à des spectres assis sur le pont, nos écoutilles ouvertes d'où s'exhalait une vapeur infecte, les entreponts pleins de mourans, les gaillards couverts de malades qu'on exposait au soleil, et qui mouraient en nous parlant. Je n'oublierai jamais un jeune homme de dix-huit ans à qui j'avais promis la peille un peu de limonade. Je le cherchais sur le pont parmi les autres; on me le montra sur la planche; il était mort pendant la nuit.



LETTRE V.

OBSERVATIONS NAUTIQUES.


Avant d'entrer dans aucun détail sur l'Ile-de-France, je joindrai à mon journal les observations des marins les plus expérimentés sur la route que nous venons de faire.

Quelque réguliers que soient les vents alizés et généraux, ils sont sujets à varier le long des côtes et aux environs des îles.

Il s'élève une brise ou vent de terre, presque toutes les nuits, le long des grands continens.