Page:Voyage à l Ile de France 1.pdf/74

Cette page n’a pas encore été corrigée

légèrement. Au cap de Bonne-Espérance, où il il n'y a point de tortues, les scorbutiques guérissent au moins aussi promptement que dans l'hôpital de l'Ile-de-France, où on les traite avec les bouillons de cet animal. A notre arrivée, presque tout le monde fit usage de ce remède; je ne m'en servis point, parce que je n'en avais pas à ma disposition; je fus le premier guéri: je n'avais usé que des végétaux frais.

Le scorbut commence par une lassitude universelle: on désire le repos; l'esprit est chagrin; on est dégoûté de tout; on souffre le jour; on ne sent de soulagement que la nuit; il se manifeste ensuite par des taches rouges aux jambes et à la poitrine, et par des ulcères sanglans aux gencives. Souvent il n'y a point de symptômes extérieurs; mais s'il survient la plus légère blessure, elle devient incurable, tant qu'on est sur mer, et elle fait des progrès très-rapides. J'avais eu une légère blessure au bout du doigt; en trois semaines, la plaie l'avait dépouillé tout entier, et s'étendait déjà sur la main, malgré tous les remèdes qu'on y put faire. Quelques jours après mon arrivée, elle se guérit d'elle-même. Avant de débarquer les malades, on eut soin de les laisser un jour entier dans le vaisseau, respirer peu à peu l'air de la terre. Malgré ces précautions, il en coûta la vie à un homme qui ne put supporter cette révolution.