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épaules nues de l'esclave qui en furent marquées d'une longue taillade, et un revers sur le mâtin qui s'enfuit en hurlant.

Cette dame me conta qu'elle avait manqué de se noyer en allant en pirogue harponner la tortue sur les brisans. Elle allait dans les bois, à la chasse des noirs marrons; elle s'en faisait honneur: mais elle me dit que le gouverneur lui avait reproché de chasser le cerf, ce qui est défendu; ce reproche l'avait outrée: «J'eusse mieux aimé, me dit-elle, qu'il m'eût donné un coup de poignard dans le cœur.»

A quatre heures après midi, je quittai cette Bellone qui chassait aux hommes; nous coupâmes par un sentier la pointe du Diable, ainsi appelée, parce que les premiers navigateurs y virent, dit-on, varier leur boussole sans en savoir la raison. Nous passâmes en canot l'embouchure de la grande rivière qui n'est point navigable, à cause d'un banc de sable qui la traverse, et d'une cascade qu'elle forme à un demi-quart de lieue de là.

On a bâti sur sa gauche une redoute en terre, au commencement du chemin qui mène à Flacque: nous le suivîmes par l'impossibilité de marcher le long du rivage, tout rompu de roches. On rentre ici dans les bois, qui sont très-beaux, et pleins d'orangers. A un quart de lieue de là je trouvai une habitation dont le maître était absent: je m'y arrêtai.