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J'arrivais au Poste-Jacotet: c'est un endroit où la mer entre dans les terres, en formant une baie de forme ronde. On voit au milieu un petit îlot triangulaire: cette anse est entourée d'une colline qui la clôt comme un bassin. Elle n'est ouverte qu'à l'entrée où passe l'eau de la mer, et au fond, où coulent, sur un beau sable, plusieurs ruisseaux qui sortent d'une pièce d'eau douce où je vis beaucoup de poissons. Autour de cette pièce d'eau sont plusieurs monticules qui s'élèvent les uns derrière les autres en amphithéâtre. Ils étaient couronnés de bouquets d'arbres, les uns en pyramide comme des ifs, les autres en parasol: derrière eux s'élançaient quelques têtes de palmistes avec leurs longues flèches garnies de panaches. Toute cette masse de verdure, qui s'élève du milieu de la pelouse, se réunit à la forêt et à une branche de montagne qui se dirige à la Rivière-Noire. Le murmure des sources, le beau vert des flots marins, le souffle toujours égal des vents, l'odeur parfumée des veloutiers, cette plaine si unie, ces hauteurs si bien ombragées, semblaient répandre autour de moi la paix et le bonheur. J'étais fâché d'être seul: je formais des projets; mais du reste de l'univers, je n'eusse voulu que quelques objets animés, pour passer là ma vie.

Je quittai à regret ces beaux lieux. A peine j'avais fait deux cents pas que je vis venir à ma rencontre une troupe de noirs armés de fusils. Je