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Pour cette fois on crut que la paix et l'ordre allaient régner dans l'île; mais on n'avait fait qu'ajouter de nouveaux levains à la fermentation.

Il y débarqua un grand nombre de protégés de Paris, pour faire fortune dans une île inculte et sans commerce, où il n'y avait que du papier pour toute monnaie. Ce fut des mécontens d'une autre espèce.

Une partie des habitans, qui restaient attachés à la Compagnie par reconnaissance, virent avec peine l'administration royale. L'autre portion, qui avait compté sur les faveurs du nouveau gouvernement, voyant qu'il ne s'occupait que de plans économiques, fut d'autant plus aigrie, qu'elle avait espéré plus long-temps.

A ces nouveaux schismes se joignirent les dissensions de plusieurs corps, qui, en France même, ne peuvent se concilier, dans la marine du roi, la plume et l'épée; et enfin l'esprit de chacun des corps militaires et d'administration, lequel n'étant point, comme en Europe, dissipé par les plaisirs ou par les affaires générales, s'isole et se nourrit de ses propres inquiétudes.

La discorde règne dans toutes les classes, et a banni de cette île l'amour de la société, qui semble devoir régner parmi des Français exilés au milieu des mers, aux extrémités du monde. Tous sont mécontens, tous voudraient faire fortune et s'en aller bien vite. A les entendre, chacun s'en