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160 on avoit pratiqué l’inoculation en France, on auroit sauvé la vie à des milliers d’hommes.


COMMENTAIRE

I. Fréron, en 1769, découvrit la brochure de La Coste dont on parlera plus loin. C’est à lui sans doute que répondit la note ajoutée en 1775 pour maintenir que Voltaire fut le premier avocat de l’inoculation. En réalité, il y avait eu en France, surtout de 1723 à 1725, tout un mouvement dont Fréron ne se doutait pas, ni sans doute Voltaire lui-même. La première mention de l’inoculatien qui ait été faite en France, à ma connaissance, est de 171 7. En cette année une thèse fut soutenue sur ce sujet à Montpellier par Boyer (EncycL, art. Inocul.^tion). La même année, la Bihl. Anglaise (t. I, p. 106 et 139), rendant compte des Philosophical Transactions de la Société Royale, signala les lettres du D"" Emanuel Timone et du D»" Pylarini,

161 . ^2-K ajoutent cet alinéa :

Il y a quelques années qu’un missionnaire jésuite ayant lu cette lettre (S^-K ce chapitre K errata t. LXX p. joo, cet article) et se trouvant dans un canton de l’Amérique où la petite vérole faisait {j6-K exerçait), des ravages affreux, s’avisa de faire inoculer tous les petits sauvages qu’il batisoit ; ils lui durent ainsi la vie présente et la vie étemelle : quels dons pour des sauvages 5^ !

Après sauvages, j6-K ajoutent ces deux alinéas :

Un Evoque de Vorcester39 a depuis peu prêché à Londres l’inoculation ; il a démontré en Citoyen combien cette pratique avoit conser’éde sujets à l’État ; il l’a recommandée en Pasteur charitable. On prêcherait à Paris contre cette invention salutaire, comme on a écrit ving^ ans contre les expériences de Neuton : tout prouve que les Anglais sont plus Philosophes et plus hardis que nous. Il faut bien du tems pour qu’une certaine raison et un certain courage d’esprit franchissent le pas de Calais.

Il ne faut pourtant pas s’imaginer que depuis Douvres jusqu’aux isles Orcades on ne trouve que des Philosophes ; l’espèce contraire compose toujours le grand nombre. L’inoculation fut d’abord combattue à Londres ; et, longtems avant que TÉvêque de Vorcester annonçât cet Evangile en chaire, un Curé s’était avisé de prêcher contre ; il dit que Job avait été inoculé par le diable^o. Ce Prédicateur était fait pour être Capucin, il n’était guères digne d’être né en Angleterre. Le préjugé monta donc en chaire le premier, et la raison n’y monta qu’ensuite : c’est la marcLe ordinaire de l’esprit humain.