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Il m’a paru utile de donner une édition critique des Lettres philosophiques, une édition qui fût non seulement la première édition critique de cet ouvrage, mais la première aussi, à ce que je crois, d’un écrit de Voltaire, et qui inaugurât une série de travaux qu’il serait vraiment temps de commencer[1].

I

Il n’y a pas de manuscrit des Lettres philosophiques si ce n’est pour la première rédaction de la lettre XIII (Voyez l’Appendice I à cette lettre). Des copies manuscrites de l’ouvrage avaient été données à diverses personnes, à Richelieu, à Bolingbroke, à lord Bathurst[2]. Il y en avait eu un certain nombre en circulation, authentiques ou frauduleuses[3]. Je n’ai pu retrouver aucune de ces copies.

La première question qui se pose, en l’absence de manuscrits, est le choix de l’édition dont il faut prendre le texte pour base.

Sera-ce l’édition de Kehl ? Elle est sans autorité. Il ne semble pas qu’elle ait été faite, pour les Lettres philosophiques, sur un manuscrit d’auteur, ni sur une édition corrigée et contenant un état définitif du texte. Je dirai plus loin comment on peut croire qu’elle a été faite, par des collations hâtives et insuffisantes. Elle présente, avec beaucoup de menues leçons fautives, des retouches de l’éditeur, dont l’une au moins fait un éclatant non-sens[4].

D’ailleurs l’édition de Kehl ne donne pas les Lettres philosophiques, mais des morceaux épars dans le Dictionnaire philosophique et dans les Mélanges littéraires, qui ne font pas un tout. Ce n’est pas dans cet état de dissémination qu’il faut prendre l’ouvrage de Voltaire, avec tous les petits arrangements que l’opé-

  1. Pendant que ce volume s’imprimait, M. André Morize, ancien élève de l’Ecole Normale, agrégé des Lettres, a publié dans la Revue de Philologie française (t. XXII, pp. 41 et 161) un texte critique du Mondain.
  2. Ed. Moland, t. XXXIII, p. 326 ; 24 février 1733.
  3. « Il y a longtemps que ces lettres sont connues en manuscrit. » (Mercure, juin 1733.)
  4. Lettre XVIII, ligne 98.