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CHANT XV


Argument.- Grand repas à l’hôtel de ville d’Orléans, suivi d’un assaut général. Charles attaque les Anglais. Ce qui arrive à la belle Agnès et à ses compagnons de voyage[1].


Censeurs malins, je vous méprise tous,
Car je connais mes défauts mieux que vous.
J’aurais voulu dans cette belle histoire,
Écrite en or au temple de Mémoire,
Ne présenter que des faits éclatants,
Et couronner mon roi dans Orléans
Par la Pucelle, et l’Amour, et la Gloire.
Il est bien dur d’avoir perdu mon temps
A vous parler de Cutendre et d’un page,
De Grisbourdon, de sa lubrique rage,
D’un muletier et de tant d’accidents
Qui font grand tort au fil de mon ouvrage.



Mais vous savez que ces événements
Furent écrits par Trithème le sage[2] ;
Je le copie, et n’ai rien inventé.
Dans ces détails si mon lecteur s’enfonce,
Si quelquefois sa dure gravité
Juge mon sage avec sévérité,
A certains traits si le sourcil lui fronce,
Il peut, s’il veut, passer la pierre ponce[3]
Sur la moitié de ce livre enchanté ;

  1. Voyez la Préface en tête de cette édition. (R.)
  2. Nous avons déjà remarqué que l'abbé Trithême n'a jamais rien dit de la Pucelle et de la belle Agnès; c'est par pure modestie que lauteur de ce poëme attribue à un autre tout le mérite de ce poëme moral. (Note de Voltaire, 1773-1774.)
  3. Dit-on pierre ponce ou de ponce? C'est une grande question. (Id., 1762.)