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STANCES. 541

XXXV.

LES DÉSAGRÉMENTS DE LA VIEILLESSE.

Oui, je sais qu'il est doux de voir dans ses jardins Ces beaux fruits incarnats et de Perse et d'Épire, De savourer en paix la sève de ses vins, Et de manger ce qu'on admire. J'aime fort un faisan qu'à propos on rôtit ; De ces perdreaux maillés le fumet seul m'attire ; Mais je voudrais encore avoir de l'appétit.

Sur le penchant fleuri de ces fraîches cascades. Sur ces prés émaillés, dans ces sombres forêts, Je voudrais bien danser avec quelques dryades ; Mais il faut avoir des jarrets.

J'aime leurs yeux, leur taille, et leurs couleurs vermeilles, Leurs chants harmonieux, leur sourire enchanteur ; 3Iais il faudrait avoir des yeux et des oreilles : On doit s'aller cacher quand on n'a que son cœur.

Vous serez comme moi quand vous aurez mon âge. Archevêques, abbés, empourprés cardinaux.

Princes, rois, fermiers généraux ; Chacun avec le temps devient tristement sage :

Tous nos plaisirs n'ont qu'un moment. Hélas! quel est le cours et le but de la vie? Des fadaises, et le néant. Jupiter, tu fis en nous créant Une froide plaisanterie !

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