Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome8.djvu/172

Cette page n’a pas encore été corrigée

S’il prétend à l’empire, en est dès lors indigne. »
Comme il disait ces mots, Mayenne entre soudain
Avec tout l’appareil qui suit un souverain.
Potier le voit entrer sans changer de visage :
« Oui, prince, poursuit-il d’un ton plein de courage,
Je vous estime assez pour oser contre vous
Vous adresser ma voix pour la France et pour nous.
En vain nous prétendons le droit d’élire un maître :
La France a des Bourbons ; et Dieu vous a fait naître
Près de l’auguste rang qu’ils doivent occuper,
Pour soutenir leur trône, et non pour l’usurper.
Guise, du sein des morts, n’a plus rien à prétendre ;
Le sang d’un souverain doit suffire à sa cendre :
S’il mourut par un crime, un crime l’a vengé.
Changez avec l’État, que le ciel a changé :
Périsse avec Valois votre juste colère !
Bourbon n’a point versé le sang de votre frère,
Le ciel, le juste ciel, qui vous chérit tous deux,
Pour vous rendre ennemis vous fit trop vertueux.
Mais j’entends le murmure et la clameur publique ;
J’entends ces noms affreux de relaps, d’hérétique :
Je vois d’un zèle faux nos prêtres emportés,
Qui, le fer à la main… Malheureux, arrêtez !
Quelle loi, quel exemple, ou plutôt quelle rage
Peut à l’oint du Seigneur arracher votre hommage ?
Le fils de saint Louis, parjure à ses serments,
Vient-il de ses autels briser les fondements ?
Au pied de nos autels il demande à s’instruire ;
Il aime, il suit les lois dont vous bravez l’empire ;
Il sait dans toute secte honorer les vertus,
Respecter, votre culte, et même vos abus.
Il laisse au Dieu vivant, qui voit ce que nous sommes,
Le soin que vous prenez de condamner les hommes.
Comme un roi, comme un père, il vient vous gouverner ;
Et, plus chrétien que vous, il vient vous pardonner.
Tout est libre avec lui ; lui seul ne peut-il l’être ?
Quel droit vous a rendus juges de notre maître ?
Infidèles pasteurs, indignes citoyens,
Que vous ressemblez mal à ces premiers chrétiens,
Qui, bravant tous ces dieux de métal ou de plâtre,
Marchaient sans murmurer sous un maître idolâtre,
Expiraient sans se plaindre, et sur les échafauds,