Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome7.djvu/40

Cette page n’a pas encore été corrigée

Melin de Saint-Gelais traduisit en prose française la tragédie de Trissino. Sa traduction fut représentée à Blois, en -1559, devant le roi Henri II.

Une autre traduction de la Sofotiisba, par Claude Mermet, notaire ducal et écrivain de Saint-Ranibert, en Savoie, fut imprimée à Lyon en lo83. On en cite ces trois vers, lorsque Scipion se fait amener ses prisonniers et qu’il voit Syphax dans le nombre :

C’est Syphax! Miscmblo, en mon cœur déploré!
Ah! quand je vois sa ruine et perte non pareille,
Je m’advise qu’autant m’en peut pendre à l’oreille.

La première pièce de Montchrestien, sieur de Vasteville, à la date de 1596. est une Sophonisbe, qu’il fit reparaître ensuite sous le titre de la Carthaginoise, ou la Liberté. C’est encore une paraphrase de l’œuvre de Trissino. Transcrivons seulement les vers de Sophonisbe buvant du poison :

Sophonisbe, tu crains, ta face devient pâle :
Ce n’est rien qu’un poison; bon cœur, avale, avale.
O liqueur agréable, ô nectar gracieux!
En boit-on de meilleur à la table des dieux?

Nicolas de Montreux, qui signait ses ouvrages Olenix de Mont-Sacré, fit imprimer une Sophonisbe en 1601. Dans cette tragédie, Scipion, apprenant la mort de l’héroïne, s’écrie :

J’approuve cette mort en assurance unique,
Et envie l’honneur de la parjure Afrique
D’avoir jadis nourri un esprit si hautain
Qui mcritoit de naître et de mourir romain.

Corneille a fait dire à Lélius, dans sa Sophonisbe dont nous allons parler tout à l’heure, ce vers :

Une telle fierté devait naître romaine.

qui semble lui avoir été fourni par Olenix de Mont-Sacré. « Ils sont morts en Romains », dira Voltaire.

Nous voici à la cinquième Sophonisbe française, celle de Mairet, qui fut célèbre en son temps. Mairet la composa en ’1629, c’est-à-dire sept ans avant le Cid de Corneille.

Mairet n’a pas craint de s’écarter de l’histoire. Il dit dans son avis au lecteur : « Le sujet de cette tragédie est dans Tite-Live, Polybe, et plus au long dans Apian Alexandrin. Il est vrai que j’y ai voulu ajouter pour l’embellissement de la pièce, et que j’ai même changé deux incidents de l’histoire assez considérables, qui sont la mort de Syphax, que j’ai fait mourir à la bataille, afin que le peuple ne trouvât pas étrange que Sopho- nisbe eût deux maris vivants; et celle de Massinisse, qui vécut jusqucs à l’extrême vieillesse. »

�� �